Corridor vert Châteauguay-Léry
Par Nicolas Bérubé, La Presse – Publié le 27 janvier 2021
Un vaste projet immobilier dans une forêt écologiquement vulnérable du corridor vert Châteauguay-Léry soulève l’inquiétude des citoyens de la Rive-Sud de Montréal.
Rejeté à l’unanimité par les conseillers municipaux de Châteauguay et de Léry, ainsi que par 99 % des citoyens, qui ont fait parvenir près de 700 mémoires sur la question, le projet de règlement PR-215 autorisant le projet dans les terrains visés pourrait être adopté dès mercredi par la MRC de Roussillon.
« Ce n’est pas compliqué : ce projet ne bénéficie d’aucune acceptabilité sociale, explique Guy Turcotte, de l’organisation SOS Forêt Fernand-Seguin. Il entraînerait des dommages majeurs et irréversibles à l’écosystème exceptionnel que représente le corridor vert Châteauguay-Léry. »
Le corridor vert Châteauguay-Léry a été convoité à de multiples reprises ces dernières années pour des projets de développement, que les citoyens ont rejetés les uns après les autres, dit M. Turcotte.
« Là, la MRC est sur le point de donner le feu vert à la destruction sans faire d’étude d’impact sur l’écosystème forestier et la biodiversité du corridor vert. »
M. Turcotte note que le projet de règlement tel qu’il a été présenté entraînait la destruction d’« entre 40 et 70 % » des aires protégées sur les terrains. « Et ce qui resterait serait lourdement perturbé. C’est comme si tu mettais 40 chevreuils dans un kilomètre carré de forêt, il ne reste plus rien au bout d’un an. »
La MRC de Roussillon est déjà l’une des plus déboisées de la Montérégie : elle a moins de 8 % de couvert forestier, alors que l’objectif visé par la Communauté métropolitaine de Montréal est 17 % de couvert forestier, note l’organisation SOS Forêt Fernand-Seguin.
Position juridique
Anne-Louise Milot, directrice des communications de la MRC de Roussillon, note que le projet de règlement PR-215 permet du « développement encadré » et prend en considération les avis défavorables transmis par les citoyens dans une campagne de consultation publique.
« On a bonifié les protections environnementales, dit-elle. C’est un projet resserré qui sera présenté mercredi. Ce qui est espéré, c’est plutôt qu’on réussisse à protéger l’intégralité des terrains en interpellant les différents gouvernements pour qu’ils fassent l’acquisition de ces terrains-là à une juste valeur marchande. »
La MRC tente dans cet exercice « d’améliorer sa position juridique », dit Mme Milot.
Des propriétaires des terrains poursuivent depuis plusieurs années la Ville de Léry, la MRC de Roussillon et la Communauté métropolitaine de Montréal pour plus de 44 millions de dollars, alléguant que la protection intégrale des terrains constituait une « expropriation déguisée ».
Pour Guy Turcotte, l’argument de l’« urgence juridique » ne tient pas, car les conseillers municipaux de Léry et de Châteauguay ont adopté ce mois-ci à l’unanimité une résolution demandant le retrait du projet PR-215 ainsi que l’intervention du gouvernement du Québec afin d’assurer la protection intégrale du corridor vert Châteauguay-Léry. Seul le maire de Châteauguay, Pierre-Paul Routhier, a voté contre la résolution.
« Les conseillers, notamment les conseillers de Léry, sont au courant des enjeux juridiques, et ont quand même rejeté à l’unanimité le projet de règlement PR-215, dit M. Turcotte. Et la MRC de Roussillon n’a entrepris aucune démarche auprès des autres ordres de gouvernement au cours des dernières années pour assurer une protection adéquate du corridor Châteauguay-Léry. »
Les citoyens ne seront satisfaits que lorsque le projet de règlement PR-215 sera retiré, dit-il. « On demande la conservation intégrale du corridor vert Châteauguay-Léry et l’aménagement éventuel de ce territoire en parc régional. »
Un milieu à valeur écologique élevée
Le corridor vert Châteauguay-Léry s’étend de l’île Saint-Bernard jusqu’au Centre écologique Fernand-Seguin, et compte environ 1000 hectares. Près de 500 hectares sont déjà protégés. La forêt qui compose le corridor vert a été identifiée par la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) comme étant un milieu naturel à valeur écologique élevée en raison de la diversité et de la maturité des peuplements forestiers.